L’interdiction d’exportation de cobalt par le Congo ne peut pas résoudre le dilemme de l’offre excédentaire du marché

La République démocratique du Congo a annoncé une suspension de quatre mois des exportations de cobalt, une décision qui met en évidence la situation difficile du plus grand producteur mondial de ce métal à une époque où les prix sont historiquement bas. Bien que cette décision ait eu un impact à court terme sur le marché du cobalt, conduisant même des opérateurs tels qu’Eurasian Resources Group (ERG) à déclarer un cas de force majeure sur les livraisons de métal pour batteries de véhicules électriques, des questions subsistent quant à savoir si l’interdiction sera suffisante pour remédier à l’offre excédentaire structurelle du marché.

Les prix du cobalt étaient tombés à leur plus bas niveau depuis plusieurs années, soit 10 dollars la livre, avant l’annonce de l’interdiction. Malgré une réduction de la production artisanale au Congo et des retards dans certains nouveaux projets tels que l’usine de cobalt de MMG à Kinsevere, l’offre mondiale de cobalt devrait encore augmenter de 238 000 tonnes en 2023 à 290 000 tonnes en 2024. En tant que sous-produit du nickel ou du cuivre, le cobalt ne dispose pas d’un mécanisme de tarification indépendant, ce qui rend difficile l’autorégulation de son approvisionnement. La hausse de la production de nickel en Indonésie et l’augmentation de la production de cuivre au Congo ont encore aggravé la surabondance de l’offre de cobalt.

L’entreprise chinoise Luoyang Molybdenum Co. Ltd. a augmenté sa production de cuivre au Congo de 55 % par rapport à l’année précédente, tout en produisant 60 000 tonnes supplémentaires de cobalt, ce qui a encore aggravé la surabondance du marché. Les stocks mondiaux de cobalt ont gonflé jusqu’à l’équivalent de 233 jours de consommation, selon le cabinet de conseil Benchmark Minerals. Bien que les prix du cobalt aient augmenté jusqu’à 15 dollars la livre après l’annonce de l’interdiction, cette hausse à court terme pourrait être difficile à maintenir.

En 2022-2023, le gouvernement congolais a suspendu les exportations de cuivre et de cobalt de Luoyang Molybdenum pendant près d’un an en raison de litiges fiscaux. Durant cette période, Luoyang Molybdenum n’a pas arrêté sa production, mais a accumulé une grande quantité de stocks. Une situation similaire pourrait se répéter après cette interdiction, provoquant une nouvelle baisse des prix du cobalt après la reprise des exportations.

Le gouvernement congolais doit rechercher une solution à plus long terme, comme la prolongation de l’interdiction d’exportation ou l’introduction d’un système de quotas d’exportation. Cependant, tant que des entreprises comme China Molybdenum et Glencore continueront de produire du cuivre à prix élevé, le cobalt continuera d’inonder le marché en tant que sous-produit. En outre, l’excédent mondial de cobalt n’est pas seulement un problème d’approvisionnement, mais la faible demande de l’industrie des batteries de véhicules électriques est également un facteur important. Alors que le marché des véhicules électriques continue de croître, l’utilisation du cobalt n’a pas augmenté en parallèle, alors que les constructeurs automobiles évoluent vers des formulations de batteries à faible teneur en cobalt ou sans cobalt.

Le cobalt a toujours des applications importantes dans les secteurs de la défense et de l’aérospatiale, et les États-Unis et l’Union européenne s’efforcent de réduire la domination de la Chine dans la chaîne d’approvisionnement en cobalt. Un accord d’approvisionnement à long terme entre le gouvernement congolais et les pays occidentaux pourrait être un moyen efficace de remédier à sa surproduction. Cependant, une interdiction d’exportation de quatre mois n’a apparemment pas suffi à redresser le marché.